Annkrist nait à Bizerte (Tunisie), dans le quartier de la pêcherie. Son père est marin. À l’adolescence, elle habite le quartier du Polygone, à Brest, où vivent des Gitans, des blousons noirs et des ouvriers. « Les garçons y sont un peu plus beaux qu’ailleurs, les filles un peu plus belles, de la beauté d’Esmeralda. » Cette ville, ce quartier ont « beaucoup contribué à l’écriture et à la sonorité de [s]es chansons ».
Le dimanche après-midi, son père ouvre la maison au voisinage, vient y chanter qui veut. Elle y joue ses propres chansons, en s’accompagnant à la guitare. Elle va les chanter aussi dans les kermesses, au stade de foot, dans les cantines. Elle fait sensation au « club folk » où s’invente alors la scène brestoise.
Elle entre à l’école des Beaux-Arts. À 20 ans, diplôme en poche, elle part à l’aventure du côté de Lyon, Saint Etienne et Valence, où elle s’intéresse à la sauvegarde des artisanats populaires en perdition, broderie de jais, dentelle au fuseau. Surtout, elle découvre l’Afrique, multiplie les voyages au Niger, sillonne les déserts du Tassili, du Ténéré et du Tanesrouf.
Retour d’Afrique, elle veut « trouver un métier qui ne prenne la place d’absolument personne. » Ce sera chanteuse.
1973, elle est partie prenante de ce regain musical que connaît la Bretagne avec Glenmor, Gilles Servat [→], Tri Yann. Guitare en main, elle chante ses propres compositions dans les cabarets, les MJC, les festivals, sous chapiteau ou en plein air, en Bretagne et dans toute la France.
De nombreuses chansons en poche, elle rejoint Névénoé, un collectif d’artistes basé à Morlaix, où elle fait la rencontre de la harpiste Kristen Nogues, avec qui elle formera sur scène un duo très soudé. En juillet 1975, son premier album sort chez Névénoé. L’accueil est enthousiaste.
Six mois plus tard, sur la route qu’elle a prise pour répondre à l’invitation de Jean-Louis Foulquier sur France Inter, la voilà victime d’un terrible accident de la route. Elle remonte sur scène des mois plus tard, donne un concert au premier festival off d’Avignon. En décembre 1976, elle participe à l’émission « Noël Nouël » sur France Région 3 [→]. Par la suite, avec deux musiciens brestois, elle produit son deuxième album, « Tendre est ma nuit », qui sort chez Spalax (1978).
Cette année-là, la Fnac lance son « Contre hit-parade » : elle en est une des lauréates – en compagnie, notamment, de Francis Cabrel.
Son troisième album, « Batik original », sort en 1979 [→], et reçoit lui aussi un bel accueil critique. Mais Spalax, sa maison de disques, se saborde. Début des années quatre-vingts : le métier se durcit, les concerts se raréfient. « J’étais l’artiste qui flotte sur son nuage. Je donnais l’impression de tomber d’une planète. J’ai tenu le coup parce que je suis une super-spartiate. » Ayant décidé de s’autoproduire, il lui faudra sept années pour sortir deux albums d’un coup, « Bleu cobalt » et « Ange de nuit ». Ils décrochent le grand prix Paul Gilson de l’académie du disque Charles Cros 1987.
Toujours en 1987, Gilles Servat l’invite à l’Olympia pour la première partie d’un de ses concerts. Ce « retour de l’enfant prodige » (Ouest-France) sera suivi d’une tournée.
Puis c’est le silence. Elle réapparaît sur scène à l’invitation du festival Dre ar Wenojenn, à Glomel en 1998, donne ensuite plusieurs concerts, participant notamment à celui, collectif, des Grandes voix de Bretagne en 2001. Le dernier a lieu au Quartz de Brest, le 24 juin 2003.
Fin 2021, les éditions Goater [→] ont publié « Annkrist », un livre coordonné par le poète Jean-Claude Leroy [→], où figurent notamment toutes les paroles de ses chansons. Annkrist apparait dans « Le gang des bois du temple », le nouveau film du cinéaste Rabah Ameur-Zaïmeche [→], projeté en exclusivité en octobre 2022 au Festival International du Film Indépendant de Bordeaux, et le mois suivant au Festival International du Film de Belfort. Elle y chante une chanson jamais enregistrée en studio. Il sera en salle au printemps 2023.
En novembre de cette même année, sous l’impulsion du journaliste-écrivain Jean-Luc Porquet [→], est publié un coffret de 3 CD regroupant l’ensemble des chansons enregistrées sur les albums 33 tours, épuisés depuis longtemps : Annkrist enchantée (Cristal Iroise, 2022).
⇒ photo d’en-tête : Annkrist, Paris, 1991, par Jean-Claude Leroy